Mon oncle Antoine a 50 ans
Jeudi, 18 novembre 2021
Mon oncle Antoine fête aujourd'hui le cinquantième anniversaire de sa sortie en salle au Québec. C'est en effet le 19 novembre 1971 que ce film emblématique de notre cinématographie prend l'affiche au Cinéma Saint-Denis de Montréal, après avoir récolté les honneurs de la presse anglophone. Immédiatement qualifié de chef-d'oeuvre ou de meilleur film canadien jamais réalisé, le film le plus connu de Claude Jutra restera dans l'histoire pour plusieurs raisons, notamment parce qu'il a été l'une des premières fictions d'ici ayant réussi à obtenir un tel rayonnement en dehors de nos frontières. Le 2 octobre 1971, à Toronto, il met la main sur huit des douze récompenses décernées lors de la 23e édition du Festival du film canadien, dont il avait fait l'ouverture en première mondiale. Quelques semaines plus tard, à Chicago, le film remporte deux prix d'importance, soit meilleur film ex æquo et meilleur scénario.
Produit par Marc Beaudet pour l'Office National du film (ONF), Mon oncle Antoine obtient un beau succès commercial, estimé à plus de 350 000 entrées en salle, qui sera confirmé en septembre 1973 lors de sa première diffusion à la télévision, alors qu'il rejoint plusieurs millions de Québécois.e.s.
Au fil des décennies, la popularité du film s'est manifestée de diverses manières, incluant l'émission, en 1996, d'un timbre de Postes Canada à son effigie. En plus des critiques très positives récoltées à sa sortie, il a été cité dans de nombreuses compilations émises par la presse et par les professionnels. En 1980, il est nommé meilleur film québécois de tous les temps par la revue Séquences. Quatre ans plus tard, on le retrouve en haut de la toute première liste des films canadiens les plus importants établie par le Festival international du film de Toronto (TIFF). Il sera à nouveau premier en 1993 et 2004, avant d'être détrôné qu'en 2015 par Atanarjuat The Fast Runner de Zacharias Kunuk.
En plus de sa renommée, allant même jusqu'en Union Soviétique, Mon oncle Antoine - qui, originalement s’appelait “Silent Night" - peut aussi être considéré comme l'une des oeuvres les plus influentes de l’histoire du cinéma québécois et canadien. Alors que le Québec subit les contrecoups de la vague de chroniques érotiques qui a déferlé sur les écrans depuis la fin des années soixante, Mon oncle Antoine propose pour la première fois un récit grand public, audacieux et radicalement différent. Basé sur un scénario autobiographique de Clément Perron, il s'agit en effet de l'un des premiers longs métrages de fiction d'ici à parler d'un thème reconnu depuis comme l'une des marques de commerce de notre cinématographie : le passage à l'âge adulte.
« C'est peut-être de tous les films québécois que j'ai vus, celui qui m'a paru avoir les qualités de coeur et de sensibiilté les plus universelles.» (Louis Malle)
Tourné en grande partie dans la région de Black Lake, près de Thetford Mines, Mon oncle Antoine met en vedette le débonnaire Antoine, propriétaire du magasin général et croque-mort de la ville. Pour l'aider, il s'est adjoint les services de son neveu de quinze ans, Benoît. En tant que spectateur du monde des adultes et des ses turpitudes, Benoît entrevoit les petites transgressions des habitants du village, leurs trahisons ou leurs lâchetés. À leur contact il perdra progressivement son innocence et ses rêves d'enfant. Sous la caméra de Michel Brault, des comédiens inoubliables tels que Jacques Gagnon, Jean Duceppe, Olivette Thibault, Monique Mercure ou encore Hélène Loiselle donnent vie avec justesse et réalisme à ce milieu pittoresque, campé la veille de Noël "au pays du Québec, dans la région de l’amiante, il n’y a pas très longtemps".
Cinquante ans après sa sortie, ce chef-d'oeuvre n'a pas pris une ride et s'avère toujours aussi touchant, sensible et universel. Vous pouvez le découvrir ou le revoir sur le Criterion Channel, sur illico et iTunes ainsi que sur le site internet de l'Office national du film.