Entrevue avec Vincent Biron
Vendredi, 22 novembre 2019
Écrit par Eric K. Boulianne, Marc-Antoine Rioux et Alexandre Auger, Les Barbares de La Malbaie est le deuxième long métrage en tant que réalisateur de Vincent Biron. À la fois récit initiatique, film de hockey et drame intimiste, le film relate l'histoire de Jean-Philippe, un jeune de La Malbaie dont le rêve de devenir agent de joueurs repose en grande partie sur la fascination qu'exerce sur lui son cousin Yves, une ancienne gloire de la LNH. Lors d'un voyage vers Thunder Bay, où a lieu le championnat canadien, l'adolescent découvrira quelques vérités sur celui qu'il croit irréprochable. Cela entraînera-t-il une remise en question de ses convictions?
Vous le saurez en allant voir Les Barbares de La Malbaie, pour lequel Vincent Biron s'est associé à une partie de l'équipe de production et de création de Prank, son premier film sorti en 2016. Contrairement à ce dernier, Vincent Biron n'a pas participé à l'écriture. « Au Québec, on n'est pas habitué avec ça, parce que on a une tradition de réalisateur-scénariste, nous indique le cinéaste. Même si je ne suis pas au scénario, j'ai quand même travaillé avec les auteurs pour qu'il soit cohérent avec ma vision, avec la texture et le ton souhaité… On a travaillé en vases communicants pour faire quelque chose d'un peu doux-amer, un peu plus mature que ce que l'on avait établi avec Prank. À mon avis, la réalisation devrait influencer l'écriture des scènes, ce travail que j'essaye d'établir de film en film. »
En effet, Les Barbares de La Malbaie évolue sur un mode plus feutré que le film précédent. C'est, entre autre, ce qui a attiré le réalisateur. « Ce qui m'a accroché dans le scénario, c'est la mélancolie des deux personnages. D'une part, on a JP, qui n'est pas sûr de réussir d'atteindre son rêve, alors il se raccroche à ce symbole, le seul qu'il ait. Et de l'autre côté, on a Yves, qui lui, ne vit que dans le regret de ce qu'il n'a pas eu. Même s'il reste encore plusieurs bonnes blagues, le fonds émotionnel est bien là, et il est universel. Même si l'on n'est pas un fan de hockey. Tout le monde a des regrets de vie… tout le monde est arrivé à des intersections et a pris le mauvais chemin. C'est ce que je voulais véhiculer. »
Aussi connu pour son travail comme directeur photo, Vincent Biron nous explique pourquoi sur ce film-là, il a laissé le soin à Marie Davignon de signer les images. « Parce que c'est trop de job… Et aussi, ce parce que que j'aime le plus sur un plateau c'est la direction d'acteurs. En plus, ce que j'avais constaté sur Prank, c'est qu'il n'y a rien de pire que de finir une prise et de devoir attendre le playback pour leur donner mes commentaires. Or, je trouve que c'est essentiel qu'un réalisateur soit présent avec eux. Il est là pour leur dire si l'on s'en va ou non vers la bonne direction. Donc, c'est de mon expérience sur Prank qu'est née l'envie de confier la caméra à quelqu'un d'autre. C'est aussi pour ça que j'ai demandé à avoir beaucoup de jours de tournage, 31 au total, ce qui est très bien. Je voulais vraiment prendre le temps. Ces derniers temps, j'ai fait beaucoup de direction photo sur des séries télé et j'ai constaté qu'on ne se laisse pas assez le temps de faire les choses. Alors que parfois, le travail avec les comédiens c'est aussi d'essayer des choses… On devrait avoir plus de temps, lorsque possible. »
Trente et un jours de tournage c'est un peu au-dessus de la moyenne québécoise. Pour autant, le film s'est fait avec un budget plutôt modeste, de l'ordre de 2,5 millions. Encore une fois, Vincent Biron a utilisé son expérience sur Prank pour adapter ses méthodes de travail aux contraintes d'un budget réduit. « Pour y arriver, on a triché… j'ai fait sept jours avec une micro-équipe de sept personnes. Comme à La Malbaie, par exemple. Je sais comment tourner avec les moyens du bord. Dans certaines scènes, on n'a presque pas retouché le décor. Le studio de radio, notamment, qui a été filmé à Châteauguay, sans que l'on ne change quoi que ce soit. En plus on est dans une esthétique un peu déglinguée, qui se prête bien à ce genre de tournage... »
Les Barbares de La Malbaie met en vedette Philippe-Audrey Larrue-St-Jacques, Justin Leyrolles-Bouchard et plusieurs autres. Nous avons demandé au réalisateur, qui a également participé au casting des comédiens principaux, comment s'était déroulé sa rencontre avec l'humoriste de Like-moi! ou Téodore pas de H. « Je faisais la direction photo du show télé de Fabien Cloutier, lorsque j'ai croisé Philippe-Audrey. J'étais en pleine réflexion sur mon casting, juste après avoir reçu l'annonce de notre financement. J'avais plusieurs options en tête, mais aucune ne me donnait vraiment l'impression que ça allait être la bonne. J'ai été attiré par la douceur, le côté candide de Philippe-Audrey, qui correspond bien au côté sombre du personnage. Je savais qu'il avit une formation de comédien, et qu'en plus il patinait bien… je l'ai reçu en audition, et immédiatement, il a confirmé l'impression que j'avais. J'ai aimé sa vulnérabilité. On a casté Philippe-Audrey en premier et ensuite je l'ai amené en audition avec des jeunes. Chez Justin, ce qui m'a intéressé c'est la maturité qu'il a malgré le jeune âge de son personnage. Ça formait un bel équilibre. »
Produit par Art et Essai et distribué par Entract Films, le film est à l'affiche dès demain vendredi dans ces cinémas.