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Québec Cinéma

Le monstre selon Robert Morin

Lundi, 28 août 2017

Si le comportement de Louis Richard, le chirurgien du Problème d’infiltration, a de quoi vous surprendre (et vous déranger), le personnage incarné par Christian Bégin n’est pas le premier dans la filmographie de Robert Morin à proposer une représentation du monstre intérieur qui sommeille en nous.

Ce visage parfois insupportable, cache sous des atours pourtant tout ce qu’il y a de plus normaux une bête féroce, prête à exploser à tout moment. Il est père de famille ou mari attentionné et a un métier à priori très honorable (chirurgien, banquier ou travailleur humanitaire). C’est que pour le cinéaste, la limite entre la normalité et la bestialité, le rationnel et l’excès est une mince ligne qu’il n’est pas si ardu que ça de franchir.

Et comme avec Morin, le suspense est une saveur qui s’entretient savamment tant l’acte irréparable a tendance à venir au détour d’une situation presque banale, en tout cas tout à fait «anti-annonciatrice», on est loin de soupçonner en le voyant que ce Régis, Vincent ou Jean-Marc, en apparence bien sous tous rapports, puisse en arriver à poser des gestes aussi extrêmes... que nous ne révélerons pas ici, mais dont vous découvrirez peut-être un aperçu grâce aux vidéos ci-dessous.

Bon visionnement!

Requiem pour un beau sans cœur

Condamné à 25 ans de réclusion, Régis Savoie s’évade. Trois jours après sa folle cavale, il est abattu par la police à la suite d’une délation. Durant ce court laps de temps, il avait croisé le chemin de huit personnes, qui feront de lui un portrait différent et qui rejetteront sur l’autre la responsabilité de la dénonciation.

Avec ce film, présenté à Cannes et primé par l’Association québécoise des critiques de cinéma, en autres prix récoltés, Morin torture le réel et enveloppe son portrait de psychopathe dans le doute et l’ambiguïté. La bête est-elle si odieuse que ça? De plus, si la responsabilité de l’acte délictuel semble établi, que peut-on retenir de celui de sa délation ? - Le film est disponible en VOD sur Illico et iTunes.

Papa à la chasse aux lagopèdes

Autre visage bien concret que celui de Vincent Lemieux, largement inspiré des «bandits à cravate» nos actualités financières. Il est banquier devenu fraudeur recherché par la police. Sa chasse aux lagopèdes n’est qu’un prétexte adressé à ses filles alors qu’il prend la fuite vers le Grand Nord en vue d’échapper aux autorités. Là encore, Morin propose une vision sardonique de notre société, et un portrait trouble de monstre pour lequel nous partageons tous une part de responsabilités. Le film est à voir en intégralité sur le site de TFO ou sur le site de l’ONF.

Journal d’un coopérant

Si le mal est bien présent chez nous, il s’exporte aussi en Afrique, dans ce film qui à notre connaissance est le seul tourné à l’étranger par Morin. Cette fois, c’est de Jean-Marc Phaneuf, technicien retraité qui rénove des radios communautaires en Afrique, dont il s’agit. Tourné à l’origine en épisodes publiés sur le web, ce long métrage présenté en première aux RVCQ 2010 propose une autre facette de notre bestialité, encore une fois masquée par l’apparence d’une activité hautement respectable, l’aide humanitaire. Dans ce portrait désabusé de la coopération internationale, Morin n’hésite pas à tracer les contours d’un personnage «dégueulasse», qui réalise que nos missions bienfaitrices ne sont peut-être pas si angéliques que ça. Un profond malaise en ressort. Procurez-vous le film en DVD.

 

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